Après la conférence de Yalta

Solution au conflit polonais

Mais revenons-en à ce que le communiqué a dit, et non pas seulement à ce qu'il a laissé entendre. Les Trois sont parvenus à un accord sur la question de la Pologne.

D'une part, les Trois ont considéré que la frontière orientale de la Pologne doit suivre la ligne Curzon. D'autre part, ils ont fixé les conditions dans lesquelles le gouvernement provisoire polonais d'unité nationale doit être constitué pour être reconnu par les Trois. En fait, ils demandent une réorganisation gouvernementale plus large, incluant « les chefs démocratiques résidant en Pologne et ceux qui se trouvent à l'étranger » et de nature à répondre plus profondément aux vœux du peuple.

Remarquons en passant que la France en reconnaissant, en fait, à la fois les deux gouvernements polonais a été d'une sage et réaliste prudence. On est déçu, toutefois, d'apprendre que le gouvernement polonais de Londres a mal accueilli la déclaration de Yalta. Ce gouvernement semble se rendre compte, assez mal, tant de la situation polonaise que de l'avenir actuel de l'opinion polonaise. Par un refus, ne courrait-il pas à un suicide définitif ?

La situation adoptée pour le conflit polonais répond, d'ailleurs, à une véritable charte qu'a mise sur pied la conférence. La Déclaration de l'Europe libérée contient une doctrine pour le statut des peuples qui échappent à l'emprise nazie : « Constituer, dit cette déclaration, des autorités gouvernementales largement représentatives de tous les éléments démocratiques de ces populations et qui s'engagent à établir, dès que possible, par de libres élections, des gouvernements qui soient l'expression de la volonté des peuples. Remarquons qu'ici la France a pu servir d'exemple et que la paix sociale qui est résultée chez nous, en dépit de bien des causes de troubles, d'une solution de cet ordre, est de nature à avoir influencé les Alliés. Quoi qu'il en soit, c'est une solution analogue que la conférence a préconisée pour la Yougoslavie et on apprenait, hier soir, que le gouvernement Soubachitch s'apprêtait à rejoindre à Belgrade le maréchal Tito.

Ce n'est d'ailleurs ici qu'un épisode dans ce vaste enfantement d'un monde auquel nous assistons, et dont la conférence de Crimée marquera un des principaux épisodes. Grâce au discours clairvoyant, net et courageux du général de Gaulle, la France, bien qu'absente de Yalta, aura pu y faire entendre sa voix. De Gaulle aura su faire comprendre que rien de définitif ne peut se faire sans nous dans le monde.